témoignage Triple accélération

Moderniser infrastructures et gouvernance de la donnée pour réussir sa transformation digitale

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Carole Roumié
VP Strategic clients
Kyndryl
Habib Messaoudi
Country Practice Leader, Applications, Data & AI
Kyndryl

Sommaire de l'ouvrage

Alors que le cloud a disrupté l’IT, l’IA quant à elle peut modifier les processus métiers jusqu’à disrupter les métiers eux-mêmes. En effet, l’IA peut engendrer la révision d’un certain nombre de processus en intégrant l’automatisation de nombreuses tâches, des changements dans les modes de fonctionnement de certains métiers et rôles, voire la disparition de certains d’entre eux. Dans l’objectif de déployer une IA éthique, respectueuse de la protection des données et des droits des consommateurs, il est crucial de bien contrôler sa mise en œuvre et de mieux la gouverner. Le rôle de Kyndryl, entreprise mondiale de services informatiques, est d’accompagner les entreprises et organisations dans cette évolution majeure, en les aidant notamment à identifier les cas d’usage métiers les plus pertinents et en mettant en place les bons modèles opérationnels (dits LLMOps). Cette approche permet une gestion améliorée de l’IA et de la GenAI et d’instaurer une gouvernance et un usage alignés sur les meilleures pratiques du marché en termes de sécurité et d’éthique.

Comment aider les entreprises à mieux gérer et optimiser leurs infrastructures IT et Data ?

CR: Dans certains cas, nous observons un enjeu de modernisation des infrastructures qui pour certaines, sont obsolètes; dans d’autres cas, il s’agit d’un enjeu de « sortie des technologies » dont les coûts augmentent de manière substantielle, faisant exploser les budgets IT des entreprises. Pour aider ces entreprises à optimiser leurs infrastructures, une première étape consiste à évaluer l’état de leur patrimoine applicatif afin de déterminer ce qui doit être conservé ou réécrit ou bien modernisé, ce qui peut être migré sur le cloud ou décommissionné. L’objectif de cette étape étant de définir une cible, en accord avec les métiers.

La deuxième étape consiste à co-construire une trajectoire de transformation et à définir la durée nécessaire pour y parvenir.

La troisième étape correspond à la mise en œuvre du programme de transformation et nous disposons au sein de Kyndryl d’équipes nombreuses qui savent déployer ces programmes avec parfois l’aide de partenaires technologiques ou de sociétés de services sélectionnés sur le marché en fonction de leur expertise spécifique.
Dans tous les cas de figure et pour maîtriser efficacement la dépense IT, même à l’échelle de chaque application, il est nécessaire de mettre en place des outils et une organisation FinOps qui permettent un suivi et un contrôle réguliers des dépenses d’infrastructures.  
Certains de nos clients rencontrent des difficultés liées à :
la maturité de leurs équipes dans la gestion des coûts de leurs infrastructures, notamment sur le cloud
la diversité des plateformes (on premise, cloud ou en multicloud) qui génère une complexité additionnelle à gérer
un manque d’outillage pour évaluer le véritable coût IT.
Nous mettons à disposition de nos clients nos méthodologies et nos plateformes pour les accompagner, à chacune de ces étapes, dans la mise en place d’un suivi et d’un contrôle efficaces.

HM: Il est important de noter que la démarche de modernisation sur le volet Data suit une logique similaire. Cette approche repose sur un « assessment » initial visant à déterminer le meilleur chemin pour aider chacun de nos clients à migrer, moderniser et gérer leur plateforme de données. Dans certains cas, nous pouvons aller plus loin en intégrant des solutions de machine learning ou, de manière plus générale, de l'Intelligence Artificielle pour générer des informations pertinentes pour les métiers.

Quelles sont vos recommandations ?

CR: La réflexion doit être menée avec les directions métiers, sous forme d’atelier de Design Thinking, afin de définir les processus les plus critiques et l’approche la plus adaptée aux besoins du métier. Cela ne se traduira pas forcément par la réécriture ou la migration des applications sur le cloud. La migration vers le cloud n’est pas une fin en soi. Elle est d’autant plus pertinente si elle est associée à une modernisation permettant l’apport de valeur significative aux métiers.
Nous recommandons par conséquent d’initier une réflexion plutôt par processus métiers que par application, afin de lotir le projet en sous-projets réalisables plus rapidement et de générer des bénéfices à court terme.  

Comment les évolutions IT participent à améliorer l'expérience client en magasin ?

CR: Aujourd'hui, le consommateur en magasin souhaite avoir une bonne couverture réseau pour rechercher si besoin des informations sur les produits via son smartphone, tandis que les conseillers de vente ont aussi besoin de se connecter pour valider entre autres la disponibilité des stocks. Le premier enjeu concerne donc la qualité du réseau qui leur permet d’envoyer et de récupérer de la data depuis le magasin.
Le deuxième enjeu est que ces données doivent circuler en temps réel afin d’ajuster les promotions en fonction du contexte (peu ou beaucoup de trafic, conditions météorologiques) et d’accéder à l’inventaire disponible en magasin ou en entrepôt à un instant T.
Nous accompagnons nos clients sur ces problématiques aux côtés de nos partenaires, notamment sur des approches de « edge computing » (optimisation du traitement des données à la périphérie du réseau), de récupération des données émises par les étiquettes électroniques ou autres objets connectés en magasin (IOT). On évoque alors une expérience client « phygitale », impliquant une continuité de l’expérience d’achat entre le domicile et le magasin.
C’est le cas par exemple du nouveau concept store WOW en Espagne, qui provient du digital et qui se déploie désormais sous forme de magasins physiques. Nous les avons accompagnés sur les aspects de mise à disposition des données pour garantir la continuité entre le monde digital et le magasin physique afin de permettre une expérience client unique, immersive, notamment avec des showrooms digitaux.

Comment utilisez-vous l’intelligence artificielle au sein de vos solutions ?

HM: Nous avons établi des partenariats globaux avec Amazon, Microsoft et Google pour innover et offrir des solutions exploitables à nos clients. En prenant en compte les spécificités de chaque secteur, nous développons des cas d'usage adaptés. Nos principales initiatives incluent :
-Expérience client : Personnalisation des parcours, recommandations de produits, etc…
-Expérience employé : Assistant aux opérations, détection de fraude, etc...
-Logistique : Gestion des stocks et optimisation des processus.
-Marketing : Optimisation des segmentations clients et création de campagnes automatisées.

Ce sont les principales catégories d’usages que nous adressons chez Kyndryl dans le secteur du retail.
Un exemple concret de nos interventions est un projet réalisé pour une entreprise qui possède des distributeurs de boissons. L'objectif était d'optimiser l'approvisionnement pour éviter les ruptures de stock et d’améliorer le positionnement des distributeurs. Nous avons consolidé les données des distributeurs dans un datalake et utilisé l'IA pour analyser l'historique et effectuer des prévisions. Cela a permis d'optimiser les tournées de remplissage et de proposer des repositionnements pour améliorer la performance commerciale des distributeurs.

Quels sont les principaux challenges à l'implémentation de technologies qui intègrent de l’intelligence artificielle ?

HM:  Nous avons identifié deux principaux défis, tant en France qu'à l'international : la gestion des données silotées et le Edge computing.
D'une part, les données doivent être gérées de manière cohérente entre les différentes équipes d'une entreprise. Nous nous concentrons donc sur la consolidation et la gestion des données.
D'autre part, il est crucial de garantir la continuité des opérations, surtout pour les magasins isolés, même en cas de rupture de réseau. Nous modernisons et connectons les systèmes pour extraire des informations pertinentes, tout en veillant à maintenir les infrastructures nécessaires pour assurer une continuité opérationnelle sans interruption.

CR: J’ajouterai à cela le sujet de la remontée des données des tickets de caisse en magasin, qui doit être gérée de manière régulière, tout en préservant une certaine autonomie du magasin. On ne peut pas mettre un système d'encaissement sur le cloud car si le cloud tombe en panne, tout s'arrête. Il y a donc une grande dépendance des entreprises et organisations vis-à-vis de la disponibilité du réseau.
Il y a aussi les  systèmes « legacy » à traiter. En effet, certaines applications historiques contiennent des données difficilement accessibles et qui, pourtant, seraient extrêmement utiles aux magasins. Il faut donc réussir à désenclaver ces systèmes pour en extraire les données le plus rapidement possible et les mettre à leur disposition.

HM: Comment gérez-vous le passage à l’échelle de ces nouvelles technologies au sein des entreprises ?

Un exemple d'utilisation de l'IA est l'optimisation du suivi des chaînes d'approvisionnement qui implique de multiples acteurs comme les chargeurs, les transporteurs et les destinataires. De nombreux indicateurs tels que les quantités et les délais doivent être suivis en temps réel, nécessitant la production de rapports fréquents pour identifier les problèmes et proposer des solutions en vue d'une amélioration continue.

Traditionnellement, la création d'un rapport consolidé pour l’un de nos clients pouvait prendre jusqu'à 4 heures et devait être répétée des centaines de fois par mois. Nous avons collaboré avec Google pour mettre en place un système utilisant l'IA générative, permettant aux équipes de générer des rapports en langage naturel. Les opérateurs peuvent affiner les demandes pour obtenir des rapports plus précis, le système consolidant les données en conséquence. Cela entraîne des gains de productivité significatifs et permet de se concentrer davantage sur les activités essentielles.

HM: De nombreuses entreprises se tournent vers nous pour se former à l'IA. En effet, bien que nous ne soyons pas un organisme de formation, nous détenons des accréditations pour dispenser des formations à nos clients.
Par exemple, nous avons récemment formé le comité exécutif d'une grande entreprise française sur l'usage responsable de modèles génératifs d'IA et la gestion de projets.
Nous fournissons des recommandations pragmatiques et activables à grande échelle. Nous accompagnons nos clients dans la mise en œuvre des cas d'usage concrets. Cela couvre par exemple l'amélioration du service client, en remplaçant les chatbots par des modèles conversationnels capables de traiter des notes vocales. Nous implémentons aussi des systèmes qui écoutent et retranscrivent les conversations en temps réel, détectent les émotions et recommandent des réponses. Ces innovations permettent aux conseillers de se concentrer sur les cas nécessitant une attention particulière tout en augmentant leur productivité.

Pourquoi investir en cybersécurité n’est plus une option ?

CR: Il y a aujourd'hui une forte augmentation des menaces de cyberattaque pouvant engendrer des impacts business lourds de conséquence sur la réputation, la non-continuité de l’activité et générant des risques financiers pour l’entreprise.
Par ailleurs, les entreprises doivent se mettre en conformité et respecter de nombreuses régulations en matière de protection des données personnelles.
Face à ces deux enjeux de sécurité et de compliance, les entreprises ne sont pas toujours très bien outillées et manquent souvent de compétences en interne sur la gouvernance des données et la sécurité.
Aujourd’hui on distingue deux types d’entreprises : celles qui ont conscience du risque parce qu'elles ont déjà subi une ou plusieurs cyberattaques et qui n’hésitent plus à investir massivement sur la gouvernance de la sécurité informatique et les autres qui ne réalisent peut-être pas encore suffisamment que le risque est grand.

Comment préparer une continuité de service en cas de cyberattaque ?

CR: Nous intervenons auprès de nos clients sur plusieurs axes pour maintenir leur continuité opérationnelle.

1. Nous les aidons à définir leur stratégie de résilience opérationnelle. Cela nécessite d’identifier les failles potentielles et de mettre en place une feuille de route en cas d’attaque informatique. Cela implique également la mise en place de solutions de sécurité au travers de partenaires technologiques. Et enfin nous les accompagnons de bout en bout lorsqu’ils sont la cible d’une attaque.

2 . Sur le périmètre IT, l’enjeu primordial lors d’une cyber attaque est la disponibilité des capacités informatiques en cas de perte du data center et la reprise d’activité après sinistre. C’est pourquoi nous avons déployé des solutions de DRP (Disaster Recovery Plan) pour assurer la continuité des opérations avec des équipes Kyndryl qui prennent le relai. Nous proposons aussi des solutions de coffre-fort de données et de « clean rooms » hébergées dans nos data centers pour effectuer des tests avant la reprise d’activité ainsi que des sites de repli utilisateurs où nous accueillons les équipes de nos clients qui ont subi une attaque.

«L’IA peut transformer le retail mais elle doit reposer sur des données fiables pour personnaliser les expériences clients et optimiser les chaînes d'approvisionnement.»

Entretien réalisé au 1er semestre 2024 dans le cadre de l'ouvrage Comment réussir votre stratégie de triple accélération

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