Les 4 Dimensions de la Transformation Digitale du Retail - Le Point de Vente

Avec le succès croissant du e-commerce, on pourrait donner le point de vente comme mort. Si l’on parle du magasin à l’ancienne avec ses longues queues aux caisses, ses néons éclairant des rayons de produits en vrac, alors c’est certain. Mais on observe au contraire trois stratégies à succès pour réinventer le point de vente. Deuxième épisode de notre série consacrée à la transformation du Retail.

Avec la technologie, on voit une nouvelle génération de magasins augmentés avec du “digital in store”. Si en Chine, on en est déjà à pouvoir payer avec un sourire (via biométrie dans les supermarchés Hema d’Alibaba), au sein de magasins parfois 100% automatisés comme Amazon Go aux Etats-Unis, on voit de nombreux dispositifs enrichir l’expérience en occident : des écrans pour tester du maquillage de manière virtuelle chez Sephora, en passant par le “scan and pay” chez Nike, Monoprix ou même Fnac, des cabines photos chez Uniqlo ou Covergirl, des robots comme Pepper pour animer l’espace d’accueil...
Évidemment, ces expérimentations sont loin d’être un long fleuve tranquille. De nombreux appareils sont souvent en panne, les hologrammes à reconnaissance vocale ne vous entendent pas dans le brouhaha du shopping, les écrans tactiles couverts de traces de doigts vous révulsent.
Le digital in store est une vraie sinécure. Pourtant, certaines approches apportent une réelle valeur ajoutée.
Chez Lancôme, un scanner et une mini unité de production en magasin permettent de créer un fond de teint sur mesure. La cliente passe alors des 52 teintes auparavant à 72.000 possibilités ! Nike, Converse, Coach, Prose, Neutrogena (et ses masques beauté sur mesure) vous proposent de customiser vos produits (contenus, matériaux, design, initiales…) et en profitent pour facturer un premium. Chez Amazon Go, vous n’avez même plus besoin de passer en caisse.
En parallèle de l’aspect techno, d’autres marques adeptes du retailtainment ont préféré jouer sur l’animation de leurs magasins. Chez Glossier, le design créatif de la boutique veille à proposer une “instagramabilité” maximum pour que les fans de beauté partagent leur selfie auprès de leur entourage sur les réseaux sociaux. Chez Story, le magasin devient une galerie à la Colette, avec une sélection thématique de produits, différente chaque mois.
Les DNVB (Digital Native Vertical Brand), qui ont débuté en tant que “pure players” e-commerce, ont finalement elles aussi découvert les bienfaits d’une boutique qui devient à la fois un showroom, un espace pour les évènements RP ou avec les influenceurs… On citera Sézane, Dirty Lemon, Dyson, Birchbox.
D’autres vous proposent une expérience hors norme : bookez une vraie sieste chez Casper, réservez une coupe de cheveux pour votre fille et sa poupée chez American Girl’s. Enfin, certaines marques développent la dynamique communautaire. Vous pourrez ainsi prendre un cours de Yoga en boutique chez Lululemon ou Alo Yoga, prendre des cours collectifs de bricolage chez Leroy Merlin.
Même le géant de la Tech qu’est Apple n’a pas abandonné le retail. Au contraire, chaque point de vente est un temple dédié à la marque où chaque micro détail a été pensé avec une attention maniaque. La marque dépense sans compter sur le design, les matériaux ou les localisations prestigieuses, et cela paie : Apple est le magasin le plus rentable au mètre carré des États-Unis. Enfin, d’autres marques et retailers se sont penchés sur la base : faire évoluer l’offre produit !
Car dans un monde où nous sommes ultra connectés et surinformés, les attentes en matière de transparence, d’authenticité, de traçabilité, de proximité, de qualité, d’éthique et d’inclusion n’ont jamais été aussi importantes !
On ne compte plus les magasins bios, vegans qui essaient de recréer de la confiance et de donner un certain sens à leur activité.
Nous ne sommes plus dans l'anecdote RSE (mettre en place 2 ou 3 initiatives pour greenwasher le reste de ses activités peu reluisantes en matières sociétales ou environnementales), mais bel et bien dans l'ère du “positive impact” : repenser l’impact complet de son activité et ses produits et leurs déchets sur le monde, la nature et la société.
Si Patagonia a largement ouvert la voie, la marque Everlane partage avec toute transparence les différents coûts (main d’oeuvre, matériaux, machines marge, transport) liés à un vêtement ainsi que la liste de chacune de ses usines.
L’initiative “C’est qui le patron” permet de réaliser collectivement avec les clients le cahier des charges d’un produit, de le faire fabriquer comme ils le souhaitent et de le faire commercialiser au juste prix. MyClarins propose une gamme de produits cosmétiques vegan et cruelty-free (sans test sur animaux) quand Deciem propose de donner accès aux formules chimiques de leurs produits de beauté.
Une transparence qui devient indispensable et inévitable, avec le succès des applications consommateurs comme Yuka (10 millions d’utilisateurs), Cleanbeauty, Skin Ninja...
Face à l’impact de la consommation de viande et à la croissance du véganisme, certaines startups comme Modern Meadow ou Beyond Meat sont déjà en train d’inventer des steaks ou du cuir (habillement, ameublement) bioprintés.
L’incroyable succès des burgers à la “viande” végétale de Impossible Foods montre que les changements pourraient être plus rapides qu’on imagine. Après son succès en restaurants et fastfoods, l’entreprise vient d’obtenir son autorisation de vente en grande surface. Aux États-Unis, on assiste aussi à une explosion de la vente et la consommation de produits (cosmétiques, alimentaires) dérivés du CBD, qui sont désormais légaux dans certains États.
D’autres ont enfin compris qu’il fallait veiller à l’inclusion de la diversité de leurs clients en sortant des stéréotypes de la publicité. Là où Dove a promu l’acceptation de la beauté au sens large, mêmes les marques de luxe deviennent plus inclusives : Tommy Hilfiger a lancé une gamme co-conçue avec des handicapés, Biotherm vient de signer un sportif handisport, Chanel recrute une égérie transgenre. Thinx ou My Holy ont développé des concepts retail ou e-commerce pour mettre fin au tabou des règles.
La suite de notre série sur la transformation du Retail jeudi prochain : La Supply Chain
L'épisode précédent : Les 4 Dimensions de la Transformation Digitale du Retail - L'Expérience
