Open Banking : quels enjeux pour les banques en 2020 ?
- Depuis septembre 2019, les banques sont tenues de partager certaines de leurs données clients à leurs concurrents, banques, néo-banques et fintech.
- L'objectif est de dynamiser la concurrence et de faire émerger de nouveaux services innovants pour les consommateurs.
- Le secteur commence sa recomposition : début 2020, Visa a annoncé le rachat de la fintech Plaid, pionnière des technologies de l’Open Banking, pour près de 5 milliards d’euros
Le big bang bancaire n’a pas eu lieu. Ou pas encore. En septembre 2019, la directive européenne DSP2 entrait en vigueur, obligeant les banques à ouvrir certaines de leurs données y compris à leurs concurrents. Six mois plus tard, le marché n’a pas été "dynamité" comme certains le prophétisaient. Mais il entre bien dans une phase de recomposition.
De nouvelles collaborations pour les banques françaises
Longtemps frileuses, les banques françaises mesurent désormais les apports de l'Open Banking pour leur propre activité et investissent pleinement dans le domaine. Fait nouveau : elles n’hésitent plus à collaborer avec les nouveaux acteurs du marché. "Elles ont pris conscience que si elles ont l’obligation de fournir des données, l’Open Banking leur permettait également d’en acquérir de nouvelles." explique Jérôme Albus, Regional Director de Tink.
La startup suédoise travaille avec BNP Paribas en Belgique et en Italie sur l'agrégation des comptes, l'initiation des paiements et la gestion des finances personnelles. De son côté, la Société Générale a racheté, dès 2018, la startup Treezor afin de se renforcer sur les services à destination des autres FinTechs.
Des banquiers confiants, mais...
Avec pas moins de 350 FinTechs et un écosystème très dynamique, la France se positionne comme un des leaders sur le sujet. Une situation qui amène les banquiers français à se montrer confiants. Ainsi, 45% d’entre eux voient dans l’Open Banking une opportunité pour développer de meilleurs services numériques.
Pour 34% d’entre eux, elle représente également un moyen d’offrir des services plus personnalisés à leurs clients. Pour autant, 76% d’entre eux pensent que l’Open Banking va réduire la fidélité des clients vis-à-vis de leurs banques. Fantasme ou réalité ?
De nouveaux services en perspective
Sur le papier, l’Open Banking apporte de formidables opportunités au secteur bancaire. Meilleure connaissance client, optimisation du parcours des utilisateurs, simplification des processus bancaires… autant de choses rendues possibles par la libération de la donnée. Un exemple probant est celui de Qonto, néobanque française s’adressant principalement aux entrepreneurs et TPE. S’appuyant sur sa connaissance pointue du marché, cette dernière agrège différents produits bancaires et parabancaires qu’elle achète en marque blanche à d’autres acteurs. Une situation qui lui permet d’adresser à ses clients une palette de service complète (gestions des dépenses, comptabilité, assurance…), le tout dans une application intuitive et à l’UX léché.
D’autres domaines comme la sécurité ou la lutte contre la fraude sont aussi impactés. "On peut par exemple imaginer un outil qui permettrait à un particulier de certifier ses données bancaires afin de lutter contre de potentielles usurpations d’identités lors de la prise d’un abonnement téléphonique par exemple. Côté retailer, cela pourra permettre de sécuriser une transaction en s’assurant que le client est bien en mesure de payer en plusieurs fois au vu de ses habitudes financières", explique encore Jérôme Albus.
Ne pas rater le virage de l’Open Banking
Pour Yves Blavet, Head of Open Banking à la Société Générale, la principale menace réside dans le manque de réactivité des banques traditionnelles face à l’Open Banking. "Si la taille des banques traditionnelles ne s’est pas réduite, les nouveaux acteurs captent aujourd’hui une grande partie des nouvelles créations de comptes, souligne-t-il. Ces derniers ne se pensent d’ailleurs plus comme des banques, mais comme des plateformes offrant des solutions bancaires et parabancaires […] Le risque pour les banques traditionnelles est de ne pas être assez préparées et de perdre le contrôle de la relation client, que ce soit via les réseaux physiques ou le marketing digital". Bref, de se faire désintermédier.
Et pour éviter cela, les banques vont devoir se transformer. Pour cela, 4 choix s’offrent à elles :
- Se transformer en intégrateur de service bancaire.
- Distribuer ses produits en mode Bank as a Service (BaaS)
- Acheter et vendre des services bancaires à des tiers en mode Bank as a Platform (BaaT)
- Continuer sur les métiers existants en capitalisant sur la donnée client.
Et demain, les GAFA ?
Si l’Open Banking est une tendance encore récente, elle s’inscrit néanmoins sur la durée. L’arrivée quasi quotidienne de nouveaux acteurs sur le marché combinés aux investissements massifs devraient même accentuer l’importance du sujet dans les années à venir. Et les banques traditionnelles ont encore fort à faire sur le sujet. "Beaucoup d’analystes on prédit que les FinTechs et l’Open Banking seraient une vague déferlante dans le monde de la banque et de l’assurance. La réalité montre que si ce constat est vrai, il prendra davantage la forme d’une vague de fond […], tempère Yves Blavet. Les banques qui persisteront dans leurs modèles sont promises à des lendemains difficiles. Elles doivent dès aujourd’hui commencer à se transformer en plateformes de services, notamment en permettant à d’autres acteurs d’acheter leurs produits en fonctions de leurs besoins".
D’autres acteurs pourraient eux aussi s’engouffrer dans la brèche de l’Open Banking. Si l’on pense aux GAFA et aux BATX, qui multiplient les initiatives dans le secteur bancaire, le champ des possibles est en réalité bien plus large, prévient Jérôme Albus. "À terme, l’Open Banking devrait se transformer en Open Financing. Cela se traduira par une ouverture aux assurances, aux retailers et plus globalement à toutes les entreprises qui ont à cœur d’améliorer leurs parcours clients, leurs programmes de fidélité…".