De salarié à intrapreneur
Quels sont les réels enjeux qui se jouent dans un programme d’intrapreneuriat dans les organisations ? Comment est-ce vécu en vrai par les collaborateurs ? Comment faire converger les intérêts stratégiques et Business d’une entreprise avec les motivations profondes d’un collaborateur ? Retour sur la 5e matinée d’échanges du HUBKLUB RH & Leadership.
Grégoire Gambatto, CEO et co-fondateur de Germinal[/caption] Pêcher par excès de confiance et de confort, c’est le risque que courent les intrapreneurs, met en garde Grégoire Gambatto, CEO et co-fondateur de Germinal qui dispose d’équipes dédiées pour catalyser la croissance des entreprises.
En effet, le gain de temps et l’accès facilité aux ressources dans le cadre de programmes d’intrapreneuriat développés par de grands groupes peuvent parfois se transformer en un cadeau empoisonné. Pour mettre ces collaborateur dans l’état d’esprit suivant "la victoire ou la mort", bref, pour mettre les intrapreneurs dans la situation que vivent au quotidien les entrepreneurs, Grégoire Gambatto conseille de mettre en place trois leviers de motivation : accorder aux intrapreneurs des ressources limitées, leur imposer des deadlines courtes et proposer un intéressement important. A la charge des managers de "pousser les intrapreneurs à prendre des risques pour les aider à sortir de leur zone de confort".
TF1 et La Poste : retour sur des parcours d’intrapreneuses
Emilie Baus Alaoui, manager intrapreneuse chez TF1[/caption] Après s’être penché sur "Les résistances au changement" ou "L’innovation RH", la 5e matinée d’échanges du HUBKLUB RH & Leadership a débattu sur la thématique suivante : "De salarié à intrapreneur". L’occasion pour Emilie Baus Alaoui de revenir sur son parcours d’intrapreneuse au sein de TF1. Cette cadre supérieure envisageait sérieusement de quitter le Groupe pour monter son projet d’entreprise.
Jusqu’au jour où elle a appris qu’il était "possible d’entreprendre avec un filet de sécurité chez TF1". L’ex-responsable marketing et développement suivra le conseil à la lettre en montant le premier projet d’intrapreneuriat du groupe TF1 en octobre 2015. En s’appuyant sur "une boîte à outils géante en interne", elle développe ainsi un un projet de vente de box anniversaire pour les enfants (Box ze day).
D’autres intrapreneurs, comme Siham Laux, CEO et fondatrice de la start-up Ôfildesvoisins, ont choisi l’intrapreneuriat pour donner un coup d’accélérateur à leur carrière. Après avoir gravi un à un les échelons à La Poste, l’horizon de l’ex-responsable communication commençait à se rétrécir. Créé en 2014 par le Groupe La Poste, le programme d’intrapreneuriat "20 projets pour 2020" lui a donné l’opportunité de plancher durant 6 mois sur le lancement d’une plateforme dédiée à l'habitat participatif (Ôfildesvoisins) en dehors de son temps de travail.
Lauréate du concours "20 projets pour 2020", Siham Laux consacre désormais 100 % de son temps au développement de son projet. Elle dispose également d’un budget pour monter sa start-up tout en continuant à toucher son salaire. L’image de marque de l’entreprise a aussi facilité le développement du projet.
Nous nous présentons comme une start-up accompagnée par La Poste. Cela nous a ouvert beaucoup de portes. Nous aurions pu le faire en dehors de La Poste, mais cela aurait pris beaucoup plus de temps.
Autre effet vertueux dont se réjouit Siham Laux : avoir réussi à impliquer les RH de proximité dans les process de l'intrapreneuriat, ce qui a permis de réintégrer la gestion de l’innovation au sein même du service RH.
L’intrapreunariat : un changement culturel pour les organisations
Reste qu’il n’est pas toujours facile de trouver les arguments pour convaincre le management de son entreprise. Aujourd’hui directrice du New Business chez Nexity, Marie Suzanne Locqueneux a réussi le pari d’aligner son intérêt d’intrapreneure avec le projet de son ancienne entreprise : AccorHotels. Mais il aura fallu en amont "expliquer en quoi le projet participait à accélérer le changement de culture de l’entreprise. En échange, AccorHotels m’a laissée lancer la marque JO&JOE en l’espace de 9 mois, alors qu’il faut 24 mois en général".
Autres défis de l’intrapreneuriat selon Marie Suzanne Locqueneux : trouver des sponsors et développer son réseau en interne pour convertir ses collaborateurs à l’intrapreneuriat. En particulier le middle management qui se montre frileux car cela bouleverse les rapports au quotidien, obligeant les managers à sortir de la zone de confort que constitue le management classique. Pour mettre toutes les chances de son côté, l’intrapreneuse conseille d’initier des programmes d'intrapreneuriat en "lançant des hameçons" : écriture d’articles sur l’intrapreneuriat, organisation de petits déjeuners…
Pour monter son projet rapidement sans perdre un temps précieux, Grégoire Gambatto conseille de court-circuiter la chaîne de commandement. Inutile selon lui de demander l’aval du service juridique ou marketing : "J’ai vu des intrapreneurs mettre 5 mois pour lancer leur projet à force de faire des aller-retours avec le service juridique". Un piège évité par Siham Laux qui a décidé de ne pas faire appel aux compétences juridiques de La Poste pour ne pas avoir à "tout faire valider." Une stratégie qui s’est aussi avérée payante pour un autre intrapreneur du Groupe La Poste.
On leur a donné un budget sur 2 ans et on les a sortis des process de l’entreprise. Au final, ils ont réussi à aller aussi vite qu’une start-up déjà implantée à Grenoble.
- Grégoire Gambatto
En guise de conclusion, Marie Suzanne Locqueneux est revenue sur les points positifs de l’intrapreneuriat : bénéficier du réseau, du savoir-faire et de l’effet catalyseur d’une grande entreprise pour mettre en place votre projet, mais aussi de capacités d’investissement démultipliées. Ce dernier point "permet de gagner des mois de travail en évitant des levées de fonds d’une durée de 6 mois", souligne Grégoire Gambatto.
Entrepreneur, intrapreneur ou salarié ? Il n’y a pas de statut idéal, l’essentiel étant d’avoir une vision claire de ses objectifs et d’être passionné par son travail, conclut Mo Gawdat, ex Chief Business Officer de Google X. L’auteur de "La Formule du bonheur" (éditions Larousse) a vu de ses propres yeux la stratégie mise en œuvre par la firme de Mountain View pour favoriser le bien-être de ses salariés.
Notamment à travers la règle des 20 % qui permet aux ingénieurs de Google de consacrer 20% de leur temps de travail à des recherches et projets personnels. Une expérience qui fait dire à Mo Gawdat : "Si quelque chose vous passionne, n’hésitez pas, lancez-vous ! C’est la passion de l’innovation qui doit vous guider dans vos projets. Quand vous vous consacrez pleinement à votre passion, vous travaillez dur sans avoir l’impression de travailler. L’une des clefs du succès, c’est d’aimer son travail."
Choisissez un travail que vous aimez et vous n'aurez pas à travailler un seul jour de votre vie
- aurait complété Confucius.
Le HUBKLUB RH & Leadership
La transformation digitale n’est pas une conduite du changement comme les autres. Nous allons devoir expérimenter de nouvelles règles du jeu pour vivre dans un monde en perpétuel changement. Les membres du cercle d’échanges HUBKLUB RH & Leadership, animé par Caroline Loisel et Emmanuel Vivier, ont notamment accès à 6 matinées d’échanges (petit-déjeuner, keynotes, tables rondes, retours d’expériences, workshops) et 4 visites d’entreprises innovantes et inspirantes.
Il est pensé pour les décideurs RH, les managers & CDO désireux d’accompagner les individus et le collectif à basculer vers une culture digitale plus agile, plus innovante et plus collaborative. La prochaine matinée d’échanges se déroulera le mercredi 16 mai sur la thématique suivante : "Réinventer l’expérience collaborateur". Plus d’informations : https://corp.hubinstitute.com/hubklub-rh-leadership/