Pouvez-vous définir le numérique responsable, et nous expliquer comment celui-ci peut contribuer à la décarbonation des territoires ?

David Kernanec : Pour les acteurs publics, le numérique responsable est déjà bien défini dans le cadre de la loi REEN, qui a pour vocation de décarboner et de réduire les consommations énergétiques des territoires. Dans ce contexte-là, la stratégie numérique responsable consiste à accompagner les acteurs locaux dans la réduction du poids environnemental de leur matériel : IT, data centers, informatique, flottes de mobiles…

Le numérique responsable ne se limite pas à un périmètre technologique, mais embarque aussi d'autres éléments liés à la gouvernance pour tendre vers une réduction de la consommation en interne.

Le numérique responsable accompagne aussi les acheteurs dans leur capacité à faire des choix éclairés, en prenant notamment en considération l'ensemble du cycle de vie des équipements. La D3E permet de mieux piloter ses déchets électroniques, mais également de circulariser ses équipements pour allonger leur durée de vie.

Quels sont les principaux freins pour les collectivités dans l'adoption de toutes ces mesures ?

D. K : Ces collectivités locales peuvent partir de zéro, ou avoir déjà entamé certaines démarches pour réduire leur consommation. Mais même avec un pilotage centralisé, les collectivités – peu importe leur taille – peuvent avoir des difficultés à s’organiser et à aligner leurs équipes.

De plus, les acteurs publics peuvent être freinés pour des raisons de disponibilité, de maturité ou encore de priorité. Ils ne disposent pas toujours des compétences nécessaires pour traiter les questions d'évaluation carbone, de sobriété de la data, de gestion d'instance responsable... Bref, ils auront souvent besoin de compétences externes, de personnes qui maîtrisent ce type de projets pour les sécuriser puis les cadrer ; c’est là qu’Orange Consulting intervient.

Vous accompagnez la collectivité de Beauvais sur le numérique responsable, quels sont les objectifs et résultats de cette démarche ?

D. K : La loi REEN prévoit que toutes les EPCI de plus de 50 000 habitants ont jusqu’au 1er janvier 2025 pour se doter d'une feuille de route stratégie numérique responsable. Pour y parvenir, nous avons réalisé avec Beauvais un diagnostic de maturité qui explore comment l’organisation gère le volet numérique responsable de ses activités. Ce diagnostic est complété par une évaluation du poids environnemental de ses équipements numériques, ainsi que par une cartographie des acteurs du territoire et un recensement des initiatives “numérique responsable” déjà réalisées.

Nous nous sommes aussi penchés sur des documents de type PCAET pour identifier le niveau de contribution attendue du numérique au succès des initiatives listées dans le plan.

La prochaine étape sera la description de la stratégie numérique responsable en tant que telle. Pour ce faire, nous réaliserons un certain nombre d'ateliers avec les différents métiers identifiés lors de la phase de diagnostic (achats, gestion des déchets, IT…) pour partager les constats et proposer une liste de recommandations pour lancer les débats. Suite à cela, nous affinerons la sélection des projets et leur priorisation en fonction de critères discutés et pondérés avec notre client (budget, capacité à éviter du CO2eq, faisabilité…).

Le résultat final de cette seconde phase consistera en une roadmap intégrant les ambitions du territoire, les enjeux opérationnels des métiers et l’exigence de soutenabilité des technologies utilisées.

Quels sont les facteurs clés de succès ?

D. K : Il faut un pilote qui soit très clair sur ces sujets transversaux, et qui puisse les coordonner. La sensibilisation des équipes est un autre point clé lorsque l’on commence à construire la stratégie : il faut rendre les enjeux du carbone tangibles, donner des ordres de grandeur… Il faut faire preuve de pédagogie et créer un langage commun.

Chez Orange, nous appliquons cette discipline du numérique responsable dans nos opérations, dans la sensibilisation, la formation et l'expertise de certains de nos collaborateurs. Nous voyons au quotidien que nous vivons dans un monde d'inflation de la data et diversification des usages, et nous mettons la décarbonation et la réduction de notre consommation au cœur de nos enjeux.