Esport : vers une concentration du marché | HUB Institute - Digital Think Tank
L’association France Esports, qui représente les acteurs du secteur dans l’Hexagone, vient d’ailleurs de publier son baromètre annuel avec Médiamétrie, qui confirme la croissance du marché avec 4,2 millions “d’esportifs” en France et jusqu’à 10,6 millions si l’on prend en compte les joueurs qui s’affrontent régulièrement en ligne hors classements et compétitions. Surtout, ces audiences sont très majoritairement des hommes entre 15 et 34 ans (jusqu’à 90% pour les audiences les plus engagées) et plus CSP+ que la moyenne des internautes.
??? Here is the complete infography of the Mediamétrie - France Esports 2019 study unveiled at #PGW yesterday. Main results & comments in the mini-thread below ? pic.twitter.com/nZNJSy7wkU
— Good Game Management (@GoodGameMgmt) October 30, 2019
Un territoire particulièrement favorable pour les annonceurs et les diffuseurs qui souhaitent engager avec cette cible, de plus en plus difficile à atteindre par ailleurs, à condition d’en comprendre les codes et les grandes tendances. Entre éditeurs de jeux tout-puissants et “top teams” aux audiences globales, le secteur s’est très nettement structuré et surtout concentré depuis 2 ans, créant un terrain beaucoup plus lisible et favorable pour les marques et les médias qui souhaiteraient s’en emparer.
Les éditeurs, maîtres du jeu
C’est l’une des différences majeures avec le sport “traditionnel”, où le football, le rugby ou le tennis sont libres de droits. Pour l’esport, chaque jeu a un propriétaire, son éditeur.
Si l’ensemble des acteurs l’anticipaient il y a encore quelques années, c’est désormais chose faite : à de rares exceptions, les éditeurs des principaux jeux esports ont repris la main sur l’organisation des compétitions - Riot Games avec League of Legends, Blizzard avec Overwatch ou encore Activision avec Call of Duty. Exception notable, le vétéran Counter-Strike (le jeu a soufflé ses 20 bougies cette année avec un succès qui ne se dément pas) dont les plus grands championnats et tournois sont organisés par des promoteurs tiers, comme le leader mondial ESL - anciennement Electronic Sports League.
Une (re)prise de contrôle en partie due à un changement profond de modèle pour l’industrie du jeu vidéo et particulièrement des jeux en ligne, dont certains des plus pratiqués et suivis sont... gratuits. Ainsi du pionnier en la matière League of Legends, suivi par Counter-Strike ou encore Fortnite. C’est maintenant sur le long-terme que les éditeurs monétisent leurs audiences, notamment via la vente de contenus “in-game” (les fameux “skins”, ces éléments cosmétiques comme un costume pour un personnage ou un design pour une arme), dont les revenus s’élèvent à plusieurs centaines de millions voire plusieurs milliards de dollars annuels.
La fidélisation des joueurs est ainsi devenue un élément central dans la stratégie des éditeurs, et l’esport y participe au premier plan.
Une conséquence de cette reprise en main est l’apparition de systèmes de franchises (l’équivalent d’une place garantie dans une ligue), sur le modèle des grands sports US. C’est notamment le cas au niveau continental pour League of Legends, ou global pour Overwatch ou Call of Duty. Les équipes investissent jusqu’à plusieurs millions de dollars pour obtenir une place dans ces prestigieuses ligues fermées et perçoivent en contrepartie une part des revenus qu’elles génèrent - un moyen de compenser l’absence de redistribution de droits médias, source majeure de revenus pour les clubs de sports traditionnels mais inexistante dans l’esport. C’est enfin un moyen pour ces équipes d’assurer à leurs sponsors une présence au plus haut niveau sur le long terme... et les audiences qui vont avec.
Des “top teams” dans les traces des grands clubs de football
C’est le modèle cité par les dirigeants des plus grands clubs esports et il a de quoi nourrir leurs ambitions : le football, où une quinzaine d’équipes au niveau global concentrent les fonds et les fans, les deux étant intimement liés.
Du point de vue des fonds d’abord, les derniers 18 mois ont vu se succéder plusieurs levées records, principalement aux Etats-Unis et en Europe, auprès de fonds d’investissements, de personnalités du sport et de l’entertainment ou d’investisseurs privés.
Outre le volet “esportif” avec l’investissement dans les franchises citées précédemment, le recrutement de nouveaux joueurs et le développement de centres d’entraînement, ces fonds servent également à renforcer le staff des clubs, qui comptent désormais des équipes en charge du marketing, du social media ou des contenus, ce qui participe indirectement à la croissance des audiences sur les réseaux sociaux et vidéos. Ce sont dans l’ensemble les mêmes clubs qui concentrent les audiences au niveau global.
Enfin et sans surprise, ce sont toujours les mêmes équipes qui concentrent les conversations en ligne.
En conclusion...
Qu’ils choisissent de s’associer à un éditeur-organisateur de compétitions ou à un club esport, tous deux garants d’audiences et de légitimité, les annonceurs et les diffuseurs ont aujourd’hui accès à un écosystème beaucoup plus structuré et concentré qu’il y a seulement 2 ou 3 ans. Un marché plus lisible qui est aussi un gage de performance pour les partenariats, à condition toujours de s’associer au bon acteur et de déployer une stratégie de communication pertinente.