Le monde d’après-guerre a connu une prospérité sans précédent. Cette période caractérisée par la croissance économique et le plein emploi sera baptisée par l’économiste Jean Fourastié : les 30 glorieuses. La période qui suivit s’avérera plus difficile, connaissant de nombreuses crises, voyant le chômage de masse s’installer comme un phénomène durable voire irrémédiable, assistant à la percée économique de nouveaux pays comme le Japon puis la Chine, voyant sa dépendance au pétrole s’agrandir, etc.

Arrive l’époque actuelle dans laquelle la gouvernance mondiale s’organise de plus en plus pour tenter de faire face à des enjeux de plus en plus planétaires comme la gestion de crises économiques mondiale, le problème de l’écologie, des pandémies, dans un monde où les états sont de plus en plus interdépendants. Le Forum Economique Mondiale est l’un de ses grands rendez-vous au cours desquels certaines voix font entendre des messages à destination de l’humanité tout entière. On se souviendra par exemple du discours de Klaus Schwab de 2016, dans lequel il annonçait l’avènement de la quatrième révolution industrielle.

Tout récemment Jack Ma, le mythique fondateur et ancien PDG du groupe Alibaba, s’est à son tour livré à une prophétie. Ecoutez-moi bien a t-il dit, en levant le doit vers le ciel comme à son habitude, tel un général de l’armée de l’Empire du milieu : "Nous entrons dans l’ère des trois 30″. Le premier 30 correspond aux trente prochaines années au cours desquelles le monde va complètement se transformer du fait des technologies. Le second 30 fait référence au fait que ces changements interviendront du fait d’entrepreneurs de moins de trente ans. Le dernier 30 fait allusion au fait que les entreprises qui engendreront cette mutation comprendront moins de trente collaborateurs. »

La vision de Jack Ma repose sur trois tendances à l’œuvre depuis la création d’Internet.

Tout d’abord, la réduction considérable du coût de la technologie qui s’est divisé par cent. Au début du siècle, la création d’une entreprise avec une composante technique supposait des investissements considérables en comparaison de ceux qui peuvent suffire à lancer une start-up aujourd’hui et à en faire la société qui fera la sensation demain.

Ensuite, accroissement spectaculaire de la productivité des développeurs informatiques. Elle s’est multipliée par dix grâce à la logique d’ouverture et de partage du web. Aujourd’hui, le moindre codeur peut bénéficier des apports de ses prédécesseurs, y compris les meilleurs du monde, via des plateformes de partage de codes comme GitHub. Plus personnes ne part désormais d’une page blanche, mais développe à partir de fondations existantes, disponibles gratuitement et chaque jour améliorées.

Enfin, l’explosion de la taille du marché. S’il y a dix ans à peine certains doutaient encore qu’Internet devienne un jour mainstream, il suffit à présent de regarder les nombres en milliards d’utilisateurs des services proposés par les géants de l’Internet. Inutile de douter des talents de visionnaires de Jack Ma quand l’on repense à l’incroyable succès de son groupe. L’homme a désormais choisi de se retirer d’Alibaba pour se consacrer à des projets profitables au plus grand nombre dans le cadre d’une fondation, tels Bill et Melinda Gates. Espérons que l’impact ainsi produit sera plus tangible et surtout qu’il profitera aussi au 30 ans et plus.