La donnée, élément central dans le pilotage de la résilience climatique des organisations
Les territoires font face à un déluge d’événements climatiques impactant leurs ressources, leurs infrastructures et leurs populations: sécheresse, chaleur, inondations, tempêtes, … Comme le rappelle Jean-Marc Jancovici, Président de The Shift Project, dans un article publié sur Linkedin, ces événements climatiques sont notamment responsables de conséquences multiples sur le plan naturel mais aussi économique: incendies dans des régions jusqu’ici épargnées par ce phénomène, des systèmes informatiques non dimensionnés qui défaillent, une baisse de la production de centrales nucléaires et de la production éolienne ou enfin des conséquences agricoles en cascade. Face à ces dérèglements, à la nécessité de l’humanité à agir pour diminuer son impact et faire face à sa transition, les territoires et leurs parties prenantes peuvent s’appuyer sur les ressources numériques toujours plus nombreuses et accessibles et en particulier sur celles issues de l’observation de la Terre et aux capacités d’analyse spatiale.
Utiliser la donnée pour mieux comprendre, planifier, et piloter
L’approche géographique de l’analyse des données est l’une des clés de la compréhension et de l’action relative à l’adaptation de l’homme. Elle permet de comprendre et de faire face au changement climatique, quelle que soit l’échelle d’analyse, du quartier d’une ville à l’ensemble du globe terrestre. En effet, à travers le prisme de la localisation, les Systèmes d’Information Géographique (SIG) permettent de recouper des données de nature différente et, associé à l’analyse spatiale de ces données, de les transformer en information. Pour toujours mieux lutter contre le changement climatique, enjeu planétaire, il est cependant nécessaire de partager des données homogènes à l’échelle mondiale. Pour ce faire, les nation unies ont mis en place les Global Fundamental Geospatial Data Themes visant à renforcer l’accessibilité de l'information géospatiale ouverte.
Des données centrales pour établir des politiques et des outils d’évaluation en commun
Avec l’aide d’Esri, le Department of Economic and Social Affairs des Nation Unies a identifié, produit et s’emploie à partager un ensemble de jeux de données géographiques à l’échelle planétaire. Ces jeux de données permettent à l’ensemble des parties prenantes concernées d’agir en prenant un même référentiel de données partagées, et facilitent l’atteinte des objectifs de développement durable fixé par l’ONU à 2030. Ce corpus de données est un maillon clé et préalable à la caractérisation des impacts du changement climatique et à l’identification, la mise en œuvre et le suivi de solutions pour accroître la résilience climatique des territoires. De même, la directive INSPIRE initiée par la Commission européenne en 2007 vise à créer une infrastructure de données spatiales destinées à faciliter la conduite et l’évaluation des politiques environnementales de l'UE et les activités susceptibles d'avoir un impact positif sur l'environnement.
Faire parler les données grâce au Deep Learning et mieux comprendre l’impact de l’homme
De nombreuses organisations exploitent d’ores et déjà ce types de données qui, conjuguées à l’analyse spatiale, permettent de relever certains défis de l’anthropocène, une nouvelle époque géologique qui se caractérise par l’avènement des hommes comme principale force de changement sur Terre, surpassant les forces géophysiques. C’est par exemple le cas de l’action portée par The Watershed Agricultural Council sur la qualité de l’eau de New York City. L’ONG s’est chargée d'exploiter des données d’imagerie satellite des bassins naturels d’alimentation en eau potable de l’état de New York. Suite à un process de Deep Learning, elle a pu identifier les endroits où l’action de l’homme met en péril cet équilibre naturel dont des millions d’habitants dépendent en aval.
A l’avenir, l’évolution du climat va impacter fortement la nature et la localisation des zones de production agricole. La projection par modélisation des températures et des précipitations sur plusieurs décennies, ainsi que la connaissance des sols (pédologie) et de l’occupation des sols actuels et futurs, autant de données disponibles dans le living Atlas of the World d’Esri, permettent de prédire l’évolution des lieux de cultures par type de culture.
Évolution de la culture du blé aux Etats-Unis à 2050.
Ces données, couplées à des modèles et des outils de simulation et de représentation, ont donné naissance à un jumeau numérique planétaire. Grâce à lui, de très nombreuses organisations peuvent anticiper les risques et mettre en place un plan de résilience face au changement climatique.
Historiquement en France, les assureurs et les services de l’état ont été les premiers à co-investir dans une meilleure connaissance territoriale des risques. Avec l’accroissement de la fréquence et de la gravité des tempêtes, les opérateurs Telecoms sont un autre exemple sectoriel impacté, sans parler de l’impact aval pour l’économie et les populations. L’opérateur américain AT&T a par exemple exploité la puissance de l’analyse spatiale pour, non seulement, évaluer le risque du changement climatique mais également la résilience de ses infrastructures de télécommunication aux risques d’inondation et de vents tempétueux, qui lui ont coûté quelques 800 millions de dollars entre 2016 et 2018.
A l’échelle de Paris, l’Agence Parisienne du Climat a souhaité mettre en place un service public de la donnée énergétique pour améliorer le partage des données et la collaboration des acteurs autour de l’énergie et aider la ville à atteindre ses objectifs en matière de neutralité carbone.
L’application ENERSIG, basée sur la plateforme ArcGIS d’Esri, ainsi créée en agrégeant l’ensemble des données thématiques sur le territoire, permet d’améliorer la connaissance du parc bâti et donne une lecture d’ensemble des enjeux énergétiques à l’échelle du territoire parisien. Cet outil permet également de prioriser et d’organiser les actions de sollicitation et d’accompagnement des maîtres d’ouvrage, en lien avec les dispositifs existants sur le territoire.
L’usage des technologies et des données GéoSpatiales tend à se généraliser pour apporter une meilleure information utile aux décideurs publics dans leurs décisions à l'échelle mondiale comme locale. L’un des enjeux actuel est de renforcer, sinon de créer, une transversalité des connaissance et des actions, par exemple par la création de Hubs de données entre toutes les parties prenantes d’un territoire, favorisant non seulement le partage des données, mais aussi d'applications. Certains territoires comme le SGAC en Californie ou la région Centre Val de Loire en France initient ou démontrent d’ores-et-déjà que l'adaptation de l’homme au changement climatique est une affaire de collaboration pour des actions concertées et coordonnées