Le grand pari du SERM, entre promesses et réalité
Historique et cadre législatif
L'idée des SERM a été officiellement lancée en novembre 2022 par Emmanuel Macron, qui annonçait son ambition de développer un réseau de type RER dans dix métropoles françaises. Cette initiative a pris une dimension réglementaire avec l'adoption de la loi du 27 décembre 2023, qui a formalisé le cadre des SERM en redéfinissant notamment le rôle de la Société du Grand Paris (SGP), rebaptisée Société des Grands Projets.
Depuis lors, l'initiative a progressé avec la labellisation de 24 projets à l'été 2024, marquant un tournant dans la structuration de ces services.
Les enjeux des SERM
Les SERM visent à réduire la congestion routière, à décarboner les transports et à offrir une alternative fiable aux modes de transport individuels. Ces projets reposent sur trois piliers principaux :
- Un renforcement du réseau ferroviaire : augmentation des fréquences, réduction des temps de parcours, amélioration de la ponctualité.
- Une interconnexion avec d'autres modes de transport : coordination avec les bus, trams, vélos et services de covoiturage.
- Une gouvernance partagée : implication de l'État, des régions, des intercommunalités et des acteurs du transport.
Malgré ces ambitions, le développement des SERM rencontre des difficultés financières et organisationnelles. Le financement de ces infrastructures lourdes est estimé à plusieurs milliards d'euros, une charge que les collectivités peinent à supporter seules.
En ce qui concerne la desserte des métropoles, une étude récente de l’UFC-Que Choisir met en lumière une réalité préoccupante : plus de 10 millions de Français n’ont pas d’alternative à la voiture individuelle. Environ 17 % de la population métropolitaine vit dans des "zones blanches" où les transports en commun sont inexistants à moins de 10 minutes de marche. Cette situation est particulièrement critique dans les territoires ruraux comme le Gers, la Dordogne ou la Lozère, où les taux d’inaccessibilité dépassent les 60 %.
De plus, l’accès aux transports ferrés demeure fortement inégalitaire : 85,3 % des Français n’ont pas de gare à proximité immédiate, limitant ainsi les alternatives à la voiture. Cette fracture territoriale est aggravée par un modèle de financement des transports publics qui repose largement sur les contributions des entreprises locales, concentrées dans les centres urbains, laissant les régions périphériques sous-financées.
Strasbourg : une montée en puissance
Premier SERM à voir le jour en dehors de l'Île-de-France, le Réseau express métropolitain européen (REME) de Strasbourg constitue un véritable modèle d'expérimentation et d'implémentation à grande échelle. Lancé en décembre 2022, il a connu un démarrage difficile en raison d'un manque d'anticipation sur la disponibilité du personnel et des infrastructures. Deux ans plus tard, le REME tourne aujourd'hui à 700 trains supplémentaires par semaine, avec une ponctualité en nette amélioration (92 % des trains à l'heure sur certains axes).
La fréquentation a bondi de 15 % en 2023, prouvant l'intérêt des habitants. Strasbourg est désormais la gare de province la plus fréquentée de France, avec plus de 350 trains quotidiens.
Toutefois, la capacité d'accueil de la gare atteint ses limites, et les collectivités discutent d'investissements supplémentaires pour ouvrir la gare à 360 degrés et permettre à terme d'atteindre l'objectif initial de 800 trains supplémentaires par semaine.
Grenoble : une coordination intermodale essentielle
Dans l'aire grenobloise, la démarche est bien avancée. Le Service Express Régional Métropolitain de Grenoble a été lancé officiellement le 20 janvier 2025 et vise un développement intégré du train, des transports en commun, du vélo et des services d'autocars.
La particularité du projet grenoblois réside dans sa gouvernance élargie, impliquant l'État, la Région, le Département, Grenoble Alpes Métropole et d'autres intercommunalités. Ce cadre de concertation doit permettre de définir les services prioritaires, les interconnexions et les investissements nécessaires.
Le principal défi reste le financement, avec une estimation entre 1 et 1,5 milliard d'euros. Les collectivités demandent une implication forte de l'État, au-delà des financements prévus pour les études de faisabilité.
Clermont-Ferrand : une démarche en construction
Bien que Clermont-Ferrand n'était pas initialement concernée par l'annonce présidentielle, la ville a finalement intégré la liste des territoires bénéficiaires des SERM. Son projet vise à renforcer l'offre ferroviaire sur l'axe historique de la vallée de l'Allier, tout en améliorant la connexion avec les bus et les services intercommunaux.
L'étude de faisabilité, confiée à la Société des Grands Projets, doit être bouclée pour l'été 2026, avec une mise en place des premiers services attendue en 2029. Un des points stratégiques du projet est l'intégration de la carte Oura comme titre de transport unique pour tous les modes de déplacement.
Lyon : un projet structurant à grande échelle
Avec sa densité urbaine élevée et ses problèmes de congestion, Lyon est l'une des métropoles où l'enjeu des SERM est le plus pressant. Le projet prévoit une augmentation massive de la fréquence des trains, avec des dessertes toutes les 10 à 20 minutes sur les axes structurants.
Un point essentiel du SERM lyonnais est la construction d'une nouvelle ligne ferroviaire reliant la ville à son bassin minier ainsi que l'agrandissement des gares de la région pour accueillir des trains plus nombreux.
L'un des enjeux majeurs du projet est le financement des infrastructures, estimé à 2,5 milliards d'euros pour l'achat de nouveaux trains. La région pousse pour un nouveau modèle de financement, qui pourrait inclure des contributions des entreprises et des usagers.
Un projet ambitieux mais fragile
Les SERM représentent une opportunité majeure pour la transition écologique et l'amélioration des mobilités urbaines. Toutefois, les incertitudes sur le financement et la gouvernance ralentissent leur mise en place. Si des villes comme Grenoble, Clermont-Ferrand et Lyon avancent, d'autres restent bloquées par des problèmes budgétaires.
Pour que cette ambition devienne réalité, une implication plus forte de l'État et une clarification des modèles de financement sont indispensables. L'avenir des SERM dépendra donc de la capacité des acteurs publics à trouver un modèle économique viable et durable.
Construisons la mobilité de demain
Ne restez pas spectateurs de la transformation de la mobilité ! Les SERM sont une première réponse aux défis d’accessibilité et de durabilité, mais pour aller plus loin, les acteurs publics doivent repenser leurs stratégies et bâtir des solutions collaboratives.
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