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Fini la contrefaçon, place à la parafaçon

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Fini la contrefaçon, place à la parafaçon

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Avez-vous déjà lu le magazine Bizarre, avec des Nikedas aux pieds, dans un  Bucksstar Coffee ? C'est que vous n'êtes pas encore allé à Shenzhen, le  poumon industriel de la Chine, dans lequel déferle le phénomène Shanzhai (contraction de Shenzhen et de Banzaï). Plus qu'une mode, c'est tout un nouveau réservoir d'innovation qui se remplit à notre insu.

Une nouvelle mode 

couverture du magazine Bizarre

En plein cœur de Shanzai, la "forteresse de la guerilla" comme on la surnomme là-bas, les fashionistas chinoises ne lisent pas le magazine Bazaar mais Bizarre. Elles y découvrent les nouveaux looks composés de Nikedas (contraction de Nike et Adidas) et de vestes The North Faith (The North Face), qu'elles s'offriront avec de vrais Yuan Renminbi sortis de leur porte-monnaie Guuci (Gucci), après en avoir discuté entre filles en s'appelant tantôt avec des téléphones NuKia (Nokia), Samsing ou Smsvng (Samsung). 

Aucune marque ne semble épargnée, de Chanel à Mc Donald's en passant par Hermès. Ces  nouvelles marques chinoises, car ce sont bel et bien des marques à part entière, assument pleinement leurs origines : des marques issues du monde de la contrefaçon qui se contentaient historiquement de copier les produits des marques fabriquées en Chine pour les écouler ensuite abondamment dans le monde entier. Leurs noms et leurs logos l'attestent. La Marque NuKia a le même logo que Nokia, à l'exception près que le "o" n'est pas complètement fermé de façon à être un "u". De même, le logo de Samsvng est identique à celui de Samsung, si ce n'est que le "u" a été remplacé par un "v", ressemblant à un "u".

Un nouveau mode d'innovation

Image téléphone Nukia Samsvng

Plus qu'une nouvelle mode, c'est surtout un nouveau mode d'innovation qui voit le jour. Pour commencer, la qualité des produits de ces  marques bis n'a parfois rien à envier à celle des marques dont elles émanent. Nukia et Samsvng challengent de près Nokia et Samsung sur ce point. Ce qui ne manque pas de surprendre les touristes chinois, eux-mêmes venus faire du shopping dans les rues de Los Angeles ou de New York. Puis, ces nouvelles marques-clones ont plus récemment pris conscience qu'elles pouvaient elles aussi innover et proposent désormais des innovations enviées par les marques dont elles émanent.

A titre d'exemples, une marque locale propose un smartphone avec un rétroprojecteur HD intégré, la double fente pour insérer deux cartes SIM dans les téléphones LG ou le détecteur de fausse monnaie intégré aux téléphones Samsvng sont des pures innovations de Shanzhai. Placées au cœur des secrets industriels des entreprises innovanteselles ont su en tirer parti.

Place à la parafaçon 

Illustration livre de la parafaçon

L'histoire récente de la contrefaçon peut donc se résumer en trois vagues : une première vague dans  laquelle la contrefaçon est un phénomène qui s'est développé en marge des usines de production. Une seconde, au cours de laquelle la contrefaçon s'est organisée en une véritable industrie. Une troisième vague au cours de laquelle une nouvelle pratique émerge, consistant à ne plus seulement copier mais à innover mieux encore que les marques précédemment contrefaites. Nous la baptiserons parafaçon

Afin de rester fidèle à l'esprit Shanzhai, nous fournissons notre définition de la parafaçon, en l'entremêlant à celle de la contrefaçon. L'INSEE donne cette définition de la contrefaçon : 

La contrefaçon se définit comme la reproduction, l'imitation ou l'utilisation totale ou partielle d'une marque, d'un dessin, d'un brevet, d'un logiciel ou d'un droit d'auteur, sans l'autorisation de son titulaire, en affirmant ou laissant présumer que la copie est authentique.

Nous proposons la définition suivante de la parafaçon : 

La parafaçon se définit comme la reproduction, l'imitation ou l'utilisation totale ou partielle  d'une marque, d'un dessin, d'un brevet, d'un logiciel ou d'un droit d'auteur, avec la  complicité passive et indirecte de son titulaire, par un tiers se présentant comme une  marque en tant que telle et proposant des produits que la marque imitée aurait pu offrir et parfois mieux que l'authentique.

Pour paraphraser le philosophe chinois Thouang-Tseu qui écrivait que ce sont les pas des hommes qui font tourner la Terre, nous conclurons que ce sont les pas des Chinois qui font  tourner l'innovation. Le No Logo a laissé place au Clone Logo. Ce clone market, comme les Américains pourraient l'appeler, représentait déjà 20% du marché des téléphones portables en 2009 et tend à coloniser depuis d'autres segments du marché des biens électroniques. Regarderons-nous le futur de nos industries sur les images projetées par le rétroprojecteur HD d'un téléphone Samsvng ? 

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