Groupe Etam : les supply chains face au paradigme de l'éco-responsabilité
En propos liminaire, Benjamin Durand-Servoingt revient sur le grand paradoxe auquel doit faire face une grande entreprise comme Etam : "D'un côté, le consommateur veut plus de mode, de rapidité. Ils veulent se laisser inspirer par le dernier produit en magasin ou la dernière tendance émergente sur les réseaux sociaux. De l'autre, il milite pour plus d'engagements écoresponsables", explique-t-il avant d'ajouter que la GenZ est particulièrement touchée par ce paradigme "Ils peuvent dans la même journée militer contre le traitement des Ouïghours, interpeller les marques sur les réseaux sociaux à propos du suremballage et faire une commande sur des plateformes tels que Shen ou Boohoo."
Face à cela, les marques se doivent de réagir. "Elles peuvent choisir d'aller vers plus de mode et de rapidité, mais cela demande beaucoup d'investissement et peut résulter par beaucoup d'invendus, et par une marge moindre. Elles peuvent également choisir de s'orienter vers plus d'éco-responsabilité, mais cela va demander de repenser la production pour la rendre plus durable, d'accompagner les fournisseurs… Et pourtant, malgré cela, il y aura toujours des consommateurs pour vous dire que vous n'allez pas assez loin et qu'il faut réduire votre production", ironise Benjamin Durand-Servoingt.
Ce constat a poussé Etam à repenser l'intégralité de ses méthodes de travail, et notamment sa supply chain, afin de pouvoir allier rapidité, mode et durabilité. L'expert nous donne quelques exemples des dispositifs mis en place :
- La reprise en main de la chaîne de valeur : Etam a adopté différents outils de traçabilité afin de mapper l'intégralité de la chaîne de production d'un produit. Les effets sont aussi bénéfiques que multiples : passage de 20% (2018) à 60% (2021) de l'utilisation de matières écoresponsables en enlevant certains intermédiaires, gain sur le lead time pour intervenir dans l'usine, création de synergies entre fournisseurs et meilleurs contrôle de ces derniers.
- Livraison : face aux injonctions d'immédiateté émises par les clients, Etam a développé plusieurs outils de livraison rapides permettant de limiter l'impact écologique et économique : ship from store, click & collect, e-réservation avec possibilité de se faire livrer à vélo…
- Transparence : Etam appose sur les étiquettes de ces produits des QR Codes. Si le client scanne ce dernier, il découvre une vidéo de l'usine ou le produit a été conçu. "Cela permet de montrer les conditions de production et de réassurer le consommateur vis-à-vis de nos engagements RSE […] À terme nous aimerions déployer le dispositif sur l'ensemble des étapes de la chaîne de production afin que le client ait une visibilité totale", précise Benjamin Durand-Servoingt.
- Repenser le cycle de vie du produit : depuis 2019, Etam propose aux consommateurs un service de collecte de vêtements usagés. Une fois collectés, ceux-ci sont ensuite recyclés et transformés en isolants. La marque travaille également sur des logiques de seconde main et de recyclage intégré directement au sein des circuits de production. "Cela nous permettra par exemple à l'avenir de réutiliser les fibres textiles des produits pour en concevoir de nouveaux, et ainsi pallier de potentiels problèmes d'approvisionnement en matière première", indique l'expert.
En conclusion, Benjamin Durand-Servoingt donne sa vision de la supply chain à horizon 2025 : pour lui, cette dernière devra être innovante, automatisée, connectée, vertueuse pour l'environnement, rapide, réactive, agile, et bien entendu performante sur le plan économique.
Quand on cherche à être plus agile, on remarque que cela peut potentiellement avoir un impact sur l'environnement, et inversement. Agilité et éco-responsabilité sont aujourd'hui deux facteurs jouant fortement sur les résultats économiques d'une entreprise.
- Benjamin Durand-Servoingt, Chief Operating Officer (Groupe ETAM)