Les organisations à l'épreuve de la crise : le défi de l'essentiel
Par Marc Bensoussan, Directeur Général IBM Global Business Services, président d'IBM Interactive, et Sandrine Matichard, Content and Insights Director, HUB Institute.
Par sa vitesse et son ampleur, la crise de la Covid-19 représente pour les entreprises un double défi : protéger les collaborateurs, tout en continuant à servir au mieux les clients. Sous cette forte contrainte, elles éprouvent leur capacité de résilience avec l’aide déterminante des technologies. En effet, quel aurait été l’impact de cette crise si elle avait eu lieu il y a 10 ans avec les outils de l’époque ?
Chaque année, le Référentiel de l'entreprise apprenante dresse un panorama des transformations d’entreprise en France. Dans ce contexte si particulier, les 70 témoignages de décideurs recueillis au cours du premier semestre 2020 offrent quelques enseignements de la réalité des organisations face à la crise.
La crise, une opportunité ?
En mandarin, le mot crise est constitué de deux idéogrammes : Wei (danger) et Ji (opportunité). Et de fait, la crise est autant une menace que l’opportunité d’accélérer sa transformation, d’exploiter ses points forts. « Cette crise a été darwinienne dans la mise à l’épreuve de nos capacités de résilience et d’agilité : seuls les plus adaptés ont pu faire face », analyse Barbara Lavernos (CTO et COO, L’Oréal).
Quelle qu’ait été la force du choc, tous partagent un constat : leurs entreprises se sont autant transformées en 6 mois que depuis 6 ans. « Nous avons pu mettre en place un écosystème collaboratif en 3 mois seulement, explique Stéphane Deux, (CDO et CIO, Transdev). En lieu et place de réticence au changement, la demande est au contraire venue à nous ».
Mais comment traduire concrètement ces opportunités en leviers de relance ? Cinq idées fortes se dégagent de ces témoignages :
Le besoin d’optimisation des coûts ne doit pas se faire au détriment de l’expérience client et employé. Pour 2 décideurs sur 3 interrogés, l’expérience client reste le chantier prioritaire de la transformation. La distanciation physique est une nouvelle contrainte et appelle de nouvelles réponses.
L’efficacité opérationnelle redevient essentielle, renforcée par l’hyper-personnalisation.
Michel Jumeau (DGA, Orange) n’oppose pas satisfaction client, chiffre d’affaires et efficacité opérationnelle : « La chasse à la non-qualité permet aussi de gagner en efficacité et en qualité opérationnelle. Et d’établir la confiance ».
Les entreprises ne doivent pas se replier sur elles-mêmes mais au contraire privilégier la coopétition et le partage en construisant et animant des plateformes collaboratives. Dans le domaine de l’alimentation, le consortium IBM Food Trust (dont font partie plus de 300 acteurs comme Carrefour ou Nestlé) garantit la traçabilité des produits en s’appuyant sur la blockchain. Finance, Smart City… les cas d’usage de la blockchain se multiplient.
Une entreprise sur 2 de notre panel a lancé une initiative de type plateforme ces 18 derniers mois.
La Data & et l'IA sont plus que jamais au cœur du réacteur : Qu’il s’agisse d’identifier des fraudes financières potentielles (Crédit Mutuel) ou d’optimiser la fiabilité des trains (SNCF), l’IA est considérée comme la technologie au plus fort potentiel de disruption avec le Cloud. Sous-exploiter ses données représente donc un risque pour l’avenir de toute entreprise. On assiste également à un partage de plus en plus large des données à l’échelle des organisations, pour que chacun gagne en autonomie dans la réalisation de ses objectifs.
L’humain a été et restera en première ligne : Après le choc du confinement, l’entreprise cherche ses marques pour réinventer un lien hybride avec ses collaborateurs, générateur d’optimisation et de motivation. L’adoption des outils collaboratifs, la rapidité des décisions, les solidarités inter-métiers (comme chez Air France où il a fallu gérer un pic de 170 000 interactions client, contre 60 000 habituellement), ont révélé de nouvelles compétences, de nouveaux leaders et de nouveaux héros, sur lesquels il sera essentiel de s’appuyer dans la durée.
Plus que jamais, l’industrialisation de l’innovation est clé et doit se faire en saisissant les opportunités tout en bâtissant une relation de confiance. Dans ce contexte, les profils mixtes (technologiques et métiers) deviennent essentiels dans les projets de transformation, en dialogue avec tous les métiers, du technicien de maintenance à la direction artistique d’une maison de luxe.
Se concentrer sur l’essentiel, c’est à la fois réunir les conditions de la survie et préparer l’après. Ne pas renoncer à l’excellence de service tout en optimisant les moyens, dans le respect de la raison d’être de l’entreprise, continuer à innover pour ne pas être disrupté. Pour répondre à ce défi, la réalité de l’entreprise apprenante, capable d’envisager en permanence plusieurs scénarios et de s’y adapter, est plus que jamais capitale.
Tribune parue dans Stratégies, à retrouver ici.
Découvrez l’intégralité du Référentiel de l’entreprise apprenante réalisé par HUB Institute et IBM - 212 pages de chiffres clés, études de cas et témoignages :
> Le 6 octobre en téléchargement gratuit ici
> Le 13 octobre, en distribution papier lors du HUBFORUM Paris, au Palais de la Mutualité