Talent Intelligence : la data fait de vos employés un avantage compétitif
HUB Institute : Quels sont les enjeux du "talent management" en 2019 ?
Florent Balayé : En 1984, Accenture observait que la durée de vie d’une business skill était d’environ 30 ans avant de se métamorphoser. Aujourd’hui certains métiers, comme en marketing, se réinventent en moins de 5 ans. La fonction RH va devoir apprivoiser la donnée pour être en mesure d’anticiper ces changements et opérer les transformations opérationnelles nécessaires au sein de leurs organisations.
Elles font actuellement face à trois grands enjeux posés par la digitalisation des modèles économiques :
- L’automatisation.
- Le "skill gap" : le différentiel entre le besoin des entreprises en nouvelles compétences et la capacité du système éducatif de produire des profils qualifiés
- Le travail indépendant
HUB Institute : Face à cela, que propose LinkedIn aux DRH des entreprises ?
Florent Balayé : Ce que nous proposons aux fonctions RH des entreprises, c’est la capacité d’évaluer des tendances professionnelles et d’affiner la détection des prospects répondant aux objectifs stratégiques de l’entreprise.
Pour ce faire, le client exploitant les outils de talent intelligence de LinkedIn peut élaborer des études sur la base des données publiques de l’ensemble de notre panel d’utilisateurs. Bien sûr, ces données sont déclaratives et ne peuvent donc décharger l’humain de ses responsabilités en matière de décision. Par exemple, la décision finale d'un recrutement reposera toujours sur la rencontre du profil sollicité.
HUB Institute : Au HUBDAY Future of Work, vous dite que "pour compenser ses lacunes en matière de compétences, l’animal très malin qu’est l’homme développe des compétences différenciantes : les soft skills." Comment identifier les soft skills sur LinkedIn ?
Florent Balayé : Une étude du World Economic Forum précise qu’aujourd’hui 70% des employeurs valorisent autant les soft skills que les hard skills. Problème : là où l’identification des hard skills est relativement aisée (par l’étude des expériences professionnelles et cursus scolaires) les soft skills sont beaucoup plus compliqués à cerner. Le recruteur a l’obligation de rencontrer chacun des prospects, voire même d’entreprendre une période d’essai pour les confirmer, ce qui peut s’avérer risqué pour l’entreprise.
Les outils de talent intelligence de LinkedIn permettent d’améliorer la détection de ces soft skills (déclarés par les utilisateurs où les collaborateurs qui les recommandent sur LinkedIn) en proposant près de 100 filtres de recherche dédiés. Avec ces derniers, la fonction RH peut mener des études généralisées, notamment pour mieux cerner l’évolution des catégories professionnelles : "quels soft skills sont les plus récurrents pour les développeurs que je recherche ?" ou encore "Pour le marqueteur ayant plus de 10 années d’expérience les soft skills les plus développés sont…"
Ces informations permettent à la DRH de comparer la stratégie de son organisation aux tendances du marché et de savoir si skill gap il y a, et comment le combler.
HUB Institute : A cet effet, l’entreprise doit-elle devenir son propre centre de formation ?
C’est difficile à dire. Toutes les entreprises n’ont pas les moyens de prendre en charge à 100% la formation de leurs collaborateurs. Charge à chacune de concevoir les programmes appropriés. Cependant, il est certain qu’elles ne peuvent plus ignorer cet enjeu, car leurs collaborateurs valorisent de plus en plus leur besoin d’évolution. Ils maîtrisent désormais les notions de hard et soft skills et savent que les premiers ont une durée de vie de 5 ans quand les seconds leur assurent une valeur sur 30 ans.
Ignorer ce besoin d’apprentissage, c’est prendre le risque de faire fuir ses collaborateurs, ou au pire, d’en faire des poids morts lorsque de nouvelles fonctions métier apparaissent.
HUB Institute : Vous évoquez l’essor du travail indépendant, du nomadisme, et des valeurs des millennials comme des enjeux que la talent intelligence doit accompagner. Pouvez-vous expliquer cette relation ?
Florent Balayé : La génération Y apporte avec elle un goût prononcé pour l’entrepreneuriat et le nomadisme professionnel. Nous aimons parler de "liquid workforce", qui devrait atteindre en 2030 pas loin de 26% de la force de travail totale de l’UE.
Or, l’identification d’un prestataire répondant aux besoins de l’entreprise est souvent aussi difficile, voire plus, que la localisation d’un candidat à l’embauche performant.
Sur LinkedIn, ces entrepreneurs existent au même niveau que les candidats à l’embauche et que les employeurs. Ces prestataires déclarent tout autant d’informations au sujet de leurs compétences et de leurs assets et il est donc possible de les identifier avec précision grâce aux données que nous fournissons.
Là encore, il est possible d’identifier des tendances et des insights stratégiques : "quelle est la part de travailleurs indépendants pour telle fonction métier ?", "Ai-je vraiment besoin d’un salarié pour ces fonctions ou puis-je compter sur un externe ?"…
HUB Institute : Comment résumeriez-vous l’intérêt de la data pour les RH les plus récalcitrants ?
Florent Balayé : La data est aujourd’hui le critère différenciant entre les bonnes organisations et les organisations excellentes. Si vous souhaitez donner corps à l’expression "From good to great", il est impératif de prendre vos décisions sur la base de données tangibles et suffisamment qualitatives pour anticiper vos problématiques futures. Savoir identifier les tendances du marché c’est créer des opportunités de business plutôt que de manquer des virages importants.
James Barksdale, ex CEO de Netscape et ex COO de Fedex, résume plutôt bien l’enjeu.
If we have data, let’s look at data. If all we have are opinions, let’s go with mine.