Les nouveaux impératifs digitaux du secteur de la santé
COVID-19 : le nouveau CTO du secteur de la santé ?
Comme le rappelle Emeric Pagès, si la transformation numérique a longtemps épargné le secteur de la santé, la pandémie de la COVID-19 semble changer ce paradigme. À tel point que l’expert n’hésite pas à désigner le virus comme étant le CTO (Chief Technical Officer) du secteur. Pour lui, cette digitalisation accélérée a d’ores et déjà produit des effets concrets, qui se traduisent notamment par des changements d’habitudes pour les professionnels de santé :
- 87% des médecins utilisent des outils digitaux, contre 79% avant la crise. 80% des soignants déclarent ne plus pouvoir se passer des outils digitaux dans leurs pratiques. 67% d’entre eux déclarent ne plus pouvoir se passer de leurs smartphones dans leurs pratiques.
- Côté outils, +20,6% des soignants utilisent des plateformes de téléconsultation. Ils sont également davantage (+12,9%) à plébisciter les plateformes d’échanges entre confrères.
Quand l’on parle de patient, on parle de plus en plus de patient connecté. Google est devenu un réflexe pour ces derniers, qui n’hésitent plus à faire des recherches sur leurs maladies et symptômes. Il est donc important pour les entreprises du secteur de produire du contenu fiable et de qualité pour aider les patients dans leur gestion quotidienne de la maladie.
- Emeric Pagès, Consultant stratégie digitale / Expert Santé
Certaines entreprises ont bien compris ce changement de comportement, et n'hésitent pas à proposer de nouveaux dispositifs omnicanaux à destination des professionnels de santé. C’est par exemple le cas des laboratoires MSD et Roche, qui ont développé des portails à destination de ces publics afin de développer de nouvelles formes d’interactions, complémentaires avec celles déjà mises en place par les visiteurs médicaux. Et gare à celles qui ne sauraient s’adapter assez rapidement, car, comme le rappelle Emeric Pagès, les GAFAM effectuent une percée dans le secteur de la santé. Qu’il s’agisse d’Amazon (livraison de médicament avec Amazon Pharmacy, IoT avec Amazon Halo…), de Google (qui a fondé Calico, une entreprise dont le but est de vaincre la mort) ou encore Microsoft (avec le déploiement de plateformes dédiées aux professionnels de santé), les géants du numérique entendent bien changer la donne du secteur. Et l’expert de conclure "Cela devrait inciter les acteurs historiques à innover et à proposer de nouveaux services […] Le New Normal de demain est d’ores et déjà en train de se construire
Sanofi & Databricks : la santé à l’heure du Precision Marketing
En propos liminaire, Eddy Amarouche, rappelle le fait que "près de 83% des CEO identifient l’IA comme une priorité stratégique pour leur entreprise. La valeur créée par la technologie devrait atteindre en 2022 près de 3,9 trilliards de dollars". Pourtant, si les opportunités sont grandes, les challenges le sont tout autant. Selon Gartner et Venture Beats, 85% des projets de Big Data n’arrivent pas à terme et 87% des projets de data science n’arriveront pas en production. "La faute à un écosystème complexe, composé d’une multitude d’outils, et à des entreprises encore trop silotées, avec des équipes datas qui peinent à se parler », explique Eddy Amarouche. Une situation d’autant plus préoccupante que, comme le rappelle l’expert, le plus gros challenge de ce type de projet réside non pas dans l’algorithme, mais dans l’accès à la donnée. Pour résoudre ce problème et donner une vision unifiée aux équipes de l’entreprise, Databricks propose une plateforme unique proposant l’ensemble des business liés à la data. Cette dernière a notamment été utilisée par Sanofi à des fins de Precision Marketing.
"L’effort de transformation digitale au sein de Sanofi a débuté il y a 2 ans et s’organise autour de 4 piliers qui interagissent entre eux : le Precision Marketing, le content management, le digital health, la data & analytics", indique Antoine Tran Quan Nam. Le spécialiste revient sur les projets mis en place en termes de Precision Marketing."Quand les pays font des campagnes digitales , ils investissent de manière linéaire et saisonnière. C’est dommage, car le patient est déjà in market dès la première apparition de symptômes, et ne va chercher à se soigner que si ceux-ci persistent. Il nous semblait important d’optimiser tout cela afin d’obtenir davantage de granularité et de, par exemple, être en mesure de cibler plus précisément une région où une épidémie s’accélère".
L’approche prévisionnelle du Précision Marketing oblige cependant l’entreprise à repenser ses process, notamment car de nombreux métiers, internes ou externes, interagissent autour de ce domaine. "Il était donc nécessaire pour Sanofi de créer un process afin que toutes les actions mises en place s’effectuent de manière fluide et automatisée, et ainsi permettre d’ updater en temps réel les budgets dans les plateformes", indique Antoine Tran Quan Nam. Pour relever ce challenge, Sanofi fait appel à Databricks pour bâtir une solution end to end forecasting, qui va récupérer à la fois les données de ventes des distributeurs, mais également les données externes (social media, météo…). En fonction des données récoltées, l’allocation du budget par région évolue et est ensuite poussée dans les plateformes publicitaires.
Ce qui est intéressant dans la solution de Databricks, c’est qu’il s’agit d’une plateforme collaborative adressée à l’ensemble des métiers de la data. Elle est construite sur une version optimisée de Spark, ce qui permet de paralléliser les traitements et donc de gagner en performance. Enfin, l’intégration d’outils tels que Redash nous permet d’avoir un complément de data-visualisation.
- Antoine Tran Quan Nam, Data science expert (Sanofi)
Cette approche semble porter ses fruits : testé aux États-Unis l’approche Precision marketing, outre les gains en termes d’automatisation, a permis un retour sur investissement 2,1 fois supérieur aux campagnes classiques. Des résultats qui poussent Sanofi à vouloir scaler les cas d’usages et à dupliquer la partie technologique à d’autres départements de l’entreprise.
AXA : mieux répondre aux questions de chacun en matière de santé
Afin de prouver le rôle d’accélérateur qu’a joué la COVID-19 dans le monde de la santé, Corinne Guillemin met en avant quelques chiffres liés à l’usage de la téléconsultation "En décembre 2019, juste avant la pandémie, on enregistrait environ 25 000 téléconsultations. 4 mois plus tard, ce chiffre a bondi jusqu’à atteindre 4,5 millions de consultations à distance en un mois". Une situation qui, pour l’experte, démontre la capacité d’adaptation de l’écosystème de santé en cas de force majeure. Cependant, de nombreux besoins des patients restent encore à adresser. Parmi eux :
- Le besoin de comprendre sa maladie et d’avoir des réponses, alors même que le système de santé français est sous pression et que les professionnels ne peuvent accorder plus de temps aux patients.
- Le besoin d’orientation, avec un parcours patient complexe. Ces derniers souhaitent ainsi être conseillés et pouvoir consulter le bon professionnel en fonction de leurs besoins.
- Des besoins vis-à-vis de la santé de ses proches, avec des patients qui n’hésitent plus à s’informer directement sur Google, malgré des réponses qui ne sont pas nécessairement rédigées par des professionnels de santé et ne sont pas personnalisées.
- Le besoin de solution digitale, avec des plateformes accessibles quand le patient en a besoin et de la manière dont il le souhaite. "À cet effet, le chat semble plébiscité par les citoyens, car il permet d’effectuer plusieurs tâches en parallèle sans être interrompu. Cependant, quand ce dernier a des questions dures à exprimer, le contact oral répond davantage au besoin et continuera d’être plébiscité", observe Corinne Guillemin.
Pour répondre à ces besoins, AXA lance un nouveau service à destination de ses clients : Angel. Disponible par téléphone ou par chat, la solution se veut être un assistant dédié aux questions de santé que pourraient se poser les assurés. Ces interrogations peuvent être formulées de manière illimitée et concerner l’assuré ou ses proches. Chaque question posée est ensuite transmise à un comité composé d’experts santé aux spécialités diverses (psychologue, médecin, diététicien, infirmier…).
Chaque assuré peut poser sa question en format libre. On cache la complexité du système et du service de santé afin d’apporter une réponse qui simplifie la vie au patient. Cette réponse est complète, rédigée, personnalisée et est diffusée dans le respect du secret médical.
- Corinne Guillemin, Directrice Innovations et Services Santé & Prévoyance (AXA)
Le service, lancé au début du mois de janvier, présente d’ores et déjà des résultats satisfaisants :
- Près de 1000 conversations sont lancées chaque semaine (55% par chat, 45% par appel)
- La satisfaction client vis-à-vis du service est évalué à 4,51/5
- Le NPS atteint le score de 63/100 et 8,43 clients sur 10 recommandent Angel.
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