Future of Jobs : quelles compétences pour (survivre au travail) demain ?
Les progrès de l’intelligence artificielle, l’arrivée prochaine de la 5G, l’essor des architectures cloud, la quantité exponentielle de données à analyser… N’en jetez plus. Si elles veulent développer leurs activités, les entreprises doivent bien sûr s’emparer des technologies et comprendre comment celles-ci transforment leurs marchés. Mais les décideurs devront aussi apporter leur vision à l’une des questions les plus cruciales posées par la transformation numérique : celle de l’articulation de leur force de travail avec les machines.
En 2025, plus de la moitié des tâches au travail réalisées par des machines
Dans le rapport Future of Work 2018, le HUB Institute rappelle que l’arrivée de l’Intelligence Artificielle (IA) se traduit principalement par l’automatisation de certaines tâches, notamment les plus répétitives, permettant ainsi de se concentrer sur d’autres à plus haute valeur ajoutée. L’IA analyse un nombre de données bien plus important que ce dont l’humain est capable, et gère des situations complexes, ce qui permet de mieux guider l’humain dans ses décisions. Oui, certains métiers peuvent être amenés à disparaître, au profit de l’automatisation. Mais dans de nombreux cas, l’Intelligence Artificielle vient finalement compléter les tâches accomplies par l’humain. Pour maintenir son employabilité, il s’agit donc d’apprendre à travailler avec les machines, ou d’être positionné sur des sujets où l’humain demeure plus pertinent que l’intelligence artificielle.
Dans The Future of Jobs, son rapport 2018 sur l’avenir de l’emploi, le World Economic Forum étudie 12 secteurs d’activités dans 20 économies développées et émergentes pour comprendre l’impact des nouvelles technologies sur l’emploi. L’organisation internationale a chiffré les impacts du bouleversement à l’oeuvre dans nos façons de travailler : d'ici 2025, plus de la moitié de toutes les tâches actuelles réalisées sur le lieu de travail seront effectuées par des machines et des algorithmes, contre 29 % aujourd'hui. Malgré ce climat de forte perturbation, le solde entre les créations et les destructions d’emplois sera positif : 133 millions de nouveaux emplois devraient émerger d'ici 2022, contre 75 millions affectés par le changement de la division du travail entre humains, machines et algorithmes. Le Forum de Davos estime que les nouvelles professions émergentes actuelles, favorisées par les nouvelles technologies, devraient passer de 16% à 27% du nombre d’employés dans les grandes entreprises dans le monde. A l’inverse, les postes touchés par l’obsolescence technologique devraient passer de 31% à 21%.
Alors, quels métiers et compétences pour demain ?
Attendons-nous à une demande croissante sur les métiers directement basés sur les nouvelles technologies, ou ceux qui en tirent pleinement parti. Dans notre HUBREPORT Future of Work 2018, nos experts rappelaient le top 5 des métiers émergents d’ici 2022 : data analyst, data scientist, spécialistes en IA et en machine-learning, directeur général et d’exploitation, développeur et analyste de logiciels et d’applications, professionnel de la vente et du marketing. A l’inverse, les métiers en déclin dans le monde seront ceux de type responsable administratif, comptable, gestionnaire, responsable des paies, secrétaire administratif et exécutif, ou ouvrier. Paradoxalement, les métiers qui bénéficient de l’expertise et des qualités “humaines”, comme l’empathie, vont devenir plus demandés.
A nouveaux métiers, nouvelles compétences… Et les organisations en avance, lorsqu’il s’agit de préparer les collaborateurs pour les adapter aux emplois de demain, sont celles qui possèdent déjà une forte culture d’apprentissage.
À horizon 2022, les compétences les plus demandées seront :
- pensée analytique et innovation,
- apprentissage actif et stratégies d’apprentissage,
- créativité, originalité et initiative,
- conception et programmation de technologie,
- esprit critique et analytique.
Apprenants au long cours
La question n’est pas tant la disparition des emplois mais leur transformation. Le progrès technique nécessite des profils de plus en plus qualifiés et polyvalents, capables de s’adapter en permanence, ce qui implique de développer au long cours de nouvelles compétences et qualifications.
Selon le World Economic Forum, les employés auront en moyenne besoin de 101 jours de reconversion et de perfectionnement des compétences d’ici 2022.
Développer son employabilité et s’assurer d’une place sur le marché de l’emploi pour les travailleurs, pallier la pénurie de talents et préparer l’arrivée de l’IA pour les entreprises : pour tous, le défi majeur est l’agilité et la capacité à s’adapter à la transformation numérique – et donc, celui de la formation.
Les acteurs RH en ont bien conscience : pour 58% d’entre eux en Europe, la formation professionnelle est une responsabilité partagée entre l’entreprise et le salarié. Au lieu de miser sur les compétences immédiates, créer un environnement propice à l’apprentissage devient un enjeu stratégique : selon les DRH et RRH européens, les trois premières compétences à acquérir sont « l’agilité et l’adaptation », « apprendre à apprendre » et « une organisation efficace du temps de travail ». De l’autre côté, la formation continue est réclamée par les salariés : 53% des salariés européens seraient prêts à financer eux-même leur formation et 79% à se former en dehors de leur temps de travail.
Selon Davos, les employés auront en moyenne besoin de 101 jours de reconversion et de perfectionnement des compétences d’ici 2022. La pénurie des compétences, tant parmi les indépendants que les cadres supérieurs, est devenu un risque à prendre en compte dans la transformation et le développement de l’entreprise. Selon la filière et la localisation, entre la moitié et les deux-tiers des organisations auront certainement recours à des travailleurs externes, personnel temporaire ou free-lance, pour compenser leurs carences sur certaines compétences données.
Pour les entreprises, il est donc nécessaire de se saisir de façon proactive de ces tendances de fond via une politique globale d’acquisition et d’amélioration des compétences, de reconversion du personnel impacté par les changements, et de planification des effectifs.
La planification, une réponse proactive aux nouveaux enjeux RH des entreprises
Des outils et méthodes de planification existent pour aider les entreprises à anticiper au mieux ces mutations. La GPEC, Gestion Prévisionnelle des Emplois et des Compétences, consiste à évaluer les compétences nécessaires à la réalisation de la stratégie d’entreprise. La GPEC s’accompagne d’une obligation légale, depuis la loi de la cohésion sociale de 2005, puisque les entreprises de plus 300 salariés doivent ouvrir des négociations sur le sujet au moins tous les trois ans. Les autres peuvent disposer d’aides de l’Etat pour construire leur plan de GPEC. La GPEC s’articule avec le plan de formation de l’entreprise, dont elle assure selon toute logique l’optimisation. Autre méthode, le Strategic Workforce Planning, pilotage stratégique du capital humain, cherche à analyser les objectifs stratégiques de l’entreprise, à anticiper leurs impacts sur l’activité et à planifier les ressources nécessaires en conséquence, tant quantitatif que qualitatif.
Identification des compétences critiques pour l’avenir de l’entreprise, disponibilité des savoir-faire, attractivité à destination des talents, localisation des effectifs…. La mise en oeuvre de ces pratiques peuvent aider les entreprises à apporter des réponses proactives et positives aux grands enjeux RH induits par la quatrième révolution industrielle.
Article initialement publié dans la HUB Review 2019, la revue de la transformation business, à télécharger ici.